mardi 28 mai 2013

Jeune & jolie

François Ozon avait frappé fort l'an dernier avec « Dans la maison », belle démonstration de son
incroyable capacité à déjouer les codes du roman littéraire pour mieux les transposer dans une œuvre entièrement fictionnelle, ainsi que de son indéniable talent pour débusquer les comédiens de demain (Ernst Umhauer, nommé au César du meilleur espoir masculin).
 
Dix ans après « Swimming Pool », le plus exquis des réalisateurs français revient en compétition sur la croisette avec son nouveau long métrage, le délicat « Jeune & jolie », prévu pour une sortie en salles estivale.
Synopsis Allociné : le portrait d'une jeune fille de 17 ans en 4 saisons et 4 chansons.
Taxé de sexisme en plein milieu du festival pour ses propos peu subtiles face aux journalistes du prestigieux Hollywood Reporter « la prostitution est un fantasme commun à de nombreuses femmes […] Cela ne veut pas dire qu'elles le font, mais le fait d'être payée pour coucher est quelque chose qui est assez évident dans la sexualité féminine », on peut dire que François Ozon confirme son statut de metteur en scène provocateur et polémique.
N'en déplaisent aux festivaliers, friands de scandales, son « Jeune & jolie » est une jolie réussite, pleine de maîtrise et jamais provoc'.
 
Avec « Jeune & jolie », Ozon raconte, sans voyeurisme – ou juste ce qu'il faut – comment Isabelle, une adolescente de 17 ans, vend son corps librement à des hommes dans des hôtels, de la même manière qu'elle vivrait une expérience de vie. Par fantasme ? Par devoir ? Avidité sexuelle ? Finalement, le pourquoi importe peu dans « Jeune & jolie », il faut surtout retenir le message subliminal glissé par Ozon à travers les actes « aussi dégradante soit elle, la prostitution est, ne l'oublions pas, une forme d'exploration des désirs sexuels ».
Plus secret et nettement plus aventureux qu'avec « Potiche » ou « 8 femmes », Ozon distille les éléments de son scénario de manière progressive, quasi majestueuse, et interroge. Le réalisateur de « Sous le sable » et « Le temps qui reste » n'en délaisse pas pour autant sa mise en scène et manie avec parcimonie les ellipses pour mieux rendre compte l'émotion.
Au-delà d'une magnifique direction d'acteurs (Marine Vacth, stupéfiante, un César à la clé?), François Ozon mêle les registres une fois encore avec quintessence et luminosité lorsque son récit passe avec brio du drame à des scènes plus légères (les répliques cinglantes avec le frère de Marine Vacth).
Seul bémol si l'en est vraiment un : Ozon, bobo cynique, use et abuse parfois un peu trop souvent des clichés du genre – l'argent distribué négligemment lors des passes, le rayonnement sexuel des adolescents qui entourent Marine Vacth.
Bilan : On peut féliciter une nouvelle fois l'artiste Ozon pour avoir révélé une actrice de talent, la sublime Marine Vacth dans un rôle d'ado déboussolée par ses désirs.
« Jeune & jolie », preuve irréfutable que François Ozon compte parmi les plus brillants réalisateurs français contemporains.
 
La Bande Annonce de Jeune & jolie:
 
 
NOTE: 7/10
 

2 commentaires:

  1. Je partage globalement votre avis, sauf peut-être sur le "rayonnement sexuel des jeunes" qui entourent Isabelle, ou alors j'ai mal compris ce que vous entendiez par là. La direction d'acteurs est effectivement très soignée, la narration impeccable, sauf sans doute pour cette scène ridicule de récitation du poème de Rimbaud, très mauvaise.

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    1. Disons qu'il utilise des clichés maladroits je trouve. On est d'accord pour Rimbaud.

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