Virgin Suicides (1999)
| Sofia Coppola
En adaptant le roman
de Jeffrey Eugenides paru en 1995, la réalisatrice new-yorkaise,
alors âgée de 28 ans, signe son premier long-métrage. Scénariste
d’exception, elle parvient à convaincre la maison d'édition de
céder les droits du bouquin à la société de production, nous
délivrant ainsi un coup de maître sur la beauté et les ravages de
l’adolescence.
Synopsis Allociné :
Dans une ville américaine tranquille et puritaine des années
soixante-dix, Cecilia Lisbon, treize ans, tente de se suicider. Elle
a quatre soeurs, de jolies adolescentes. Cet incident éclaire d'un
jour nouveau le mode de vie de toute la famille. L'histoire, relatée
par l'intermédiare de la vision des garçons du voisinage, obsédés
par ces soeurs mystérieuses, dépeint avec cynisme la vie
adolescente. Petit a petit, la famille se referme et les filles
reçoivent rapidement l'interdiction de sortir. Alors que la
situation s'enlise, les garçons envisagent de secourir les filles.
Sofia Coppola possède
une arme : son style cinématographique si singulier. Dans ce drame
sombre et intimiste, la talentueuse réalisatrice expose avec
mélancolie la vie de cinq sœurs emprisonnées par leurs parents
dans un cocon bien-pensant et puritain. Planent alors sur leurs vies,
une envie, un interstice aux portes de leur prison dorée : le
suicide. Vision désenchantée de ce passage à l'âge adulte qu’est
l’adolescence, la fille de Francis Ford Coppola rythme son film
grâce au scénario puissant et envoûtant. Tout se joue dans la
tension et le désir, presque organique, de vouloir à tout prix
connaître et comprendre les motifs de cette tragédie, pourtant
offerts dès la scène d'ouverture. Le final n’en est ainsi que
plus bluffant et désarmant.
Virgin Suicides
peut se caractériser sur deux plans. Son ingéniosité réside en
effet dans le traitement à la fois léger et féerique d'une
histoire pourtant des plus cafardeuses tendance dépressogène. Ce
premier film de Coppola fille pourrait être qualifié d'un art à la
volupté. Y est exposé un univers peu exotique où le puritanisme
est lascif et la beauté insaisissable atteinte par un ras-le-bol de
bonnes mœurs. Le tout est proposé pour que ce monde vive : des
petites culottes portant des cœurs tracés au marqueur aux poignets
tailladés d’une des sœurs Lisbonne, scarifications masquées par
des bracelets en plastique colorés.
La noirceur du sujet est
brillamment affichée en contraste avec une photographie éclatante
aux couleurs pastels. Virgin Suicides rayonne grâce à cela
et par son atmosphère enchanteresse, tout en considérant la spirale
autodestructrice adolescente.
Coppola nous offre de
somptueuses images conjuguées à une mise en scène gracieuse et
aérienne. Les procédés techniques sont ingénieux et restent
toujours dans l’oxymore sujet/traitement. La narration sous forme
de voix-off laisse par exemple le spectateur libre de toute
réflexion, et l’intégration de témoignages post-récit
terriblement plaisants fonctionnent à merveille. Le choix d’un
point de vue omniscient est tout aussi judicieux et nous incite à
appréhender les filles comme le font les jeunes garçons, rêvassant
devant ses beautés pures et poussant à la curiosité. D’ailleurs,
Coppola ne retranscrit que trop bien cette idolâtrie rare et béate
des jeunes mâles face à de belles femelles.
Distribution complète et
crédible avec l’exposition massive de Kristen Dunst –
au sommet de sa forme et de son charme - mais qui n’efface pas pour
autant le brio de ses cadettes, jamais dans l’excès. Les
personnages sont aussi mystérieux et fascinants qu’attachants et
inquiétants.
De son côté,
l'extatique bande-originale du groupe Air se charge d'embellir
l'ensemble.
Mystérieux, Virgin
Suicides explore avec virtuosité le mal-être des ados et vous
laissera un arrière-goût doux amer, juste et délicat.
Article rédigé par Cléa Carré
Article rédigé par Cléa Carré
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