lundi 26 août 2013

Jobs

A la minute où la mort de Steve Jobs fut officialisé partout dans les médias, on se doutait bien qu’un biopic – œuvre cinématographique de fiction centrée sur la description biographique d’un personnage principal ayant réellement existé –  allait pointer le bout de son nez. Ce dont on ne se doutait point et qui surprit tout le monde fut le choix du comédien Ashton Kutcher pour incarner le co-fondateur emblématique de la marque Apple. Aux commandes de ce projet alléchant, Joshua Michael Stern, un novice, ou presque, puisqu’on peut lire dans son CV seulement trois œuvres méconnues en tant que scénariste / réalisateur : « Neverwas » en 2005, « Swing Vote » en 2008 et « Carnaval » en 2011. Et donc le fameux « Jobs » qui nous intéresse aujourd’hui.  
Synopsis Allociné : Partout sur la Terre, Steve Jobs est célébré comme un créateur de génie dont les inventions ont révolutionné notre façon de vivre et de percevoir notre monde. Il est aussi connu comme l’un des chefs d’entreprise les plus charismatiques et les plus inspirants qui soient. Mais qui connaît l’homme derrière l’icône ? Qui sait quel parcours humain se cache derrière la destinée de ce visionnaire d’exception ? De l’abandon de ses études universitaires au formidable succès de sa société, voici l’incroyable ascension de Steve Jobs, co-créateur d’Apple Inc., l’un des entrepreneurs les plus créatifs et respectés du XXIè siècle.
 
Après Mark Zuckerberg, c’est au tour de Steve Jobs d’avoir droit à son biopic. Sauf que n’est pas David Fincher (ou Aaron Sorkin ou Jesse Eisenberg) qui veut. Après l’accueil triomphal réservé à « The Social Network », il semblait évident que le monde informatique allait créer des émules. La comédie « Les Stagiaires » fut la première à surfer sur la vague du succès en prenant pour cadre la célèbre firme de Mountain View « Google ». C’est aujourd’hui à nouveau le cas avec « Jobs ».
Commençons par les quelques points forts du film de Joshua Michael Stern : tout d’abord, l’immersion au sein de la Silicon Valley des années 70, avec l’arrivée aux foyers des premiers ordinateurs personnels. Le spectateur assiste ainsi à la camaraderie naissante entre les deux Steve : Steve Wozniak, campé avec métier par Josh Gad, et Steve Jobs, incarné par un Ashton Kutcher qui a manifestement bûché de longues heures devant son miroir (mais cela suffit-il ?). Le premier bidouille un appareil révolutionnaire dans le salon en assemblant quelques composants achetés à la boutique du coin de la rue lorsque le second y voit un potentiel gigantesque et le pousse à présenter sa création à des investisseurs.
C’est après que ça se gâte lorsque Joshua Michael Stern choisit de montrer l’icone de la génération iPod sous un jour nouveau : celui de la tyrannie. Le réalisateur nous déballe le côté impitoyable de Steve Jobs sans vergogne, alignant les scènes (répétitives) de crises de nerf du bonhomme contre ses employés qu’il ne juge pas assez impliqués, ou ses coups de sang lorsqu’il refuse de reconnaître sa fille Lisa, laissée aux bons soins d’une mère désespérée.
Les vrais intérêts et enjeux d’un film autour d’une telle figure sont dès lors éclipsés – les créations du génie à peine présentées, un comble ! – ou survolés – la compétition avec le géant Microsoft abordée le temps d’une scène d’échange téléphonique avec Bill Gates.
Il faut avouer que la composition musicale de Lucas Vidal répondant au conformisme de mise avec des violons poussifs, la photographie de Russell Carpenter qui fait la part belle à Ashton Kutcher, et l’écriture terriblement académique, ne faisant qu’uniformiser l’ensemble à l’aide de répliques exécrables, n’aident en rien. Un exemple : « On ne peut pas regarder la compétition et dire qu’on fera mieux. On regarde la compétition et on dit qu’on fera différemment ». Comme si le metteur en scène anticipait sur le devenir gif de son film, le faisant avancer comme une moissonneuse batteuse sur la voie lourdement tracée du long métrage à messages.
Et que dire de la fin de « Jobs ». Le film explose, en effet, en plein vol et s’arrête au beau milieu de l’histoire de la Pomme, au chapitre où le fondateur de la célèbre société fait face aux défis les plus passionnants de sa vie. Quel dommage !
Bilan : Un biopic frileux qui se contente de surfer sur la vague du succès « The Social Network », le talent en moins. Si Ashton Kutcher assure le job en Jobs, le scénario incroyablement frustrant et la mise en scène pantouflarde de Joshua Michael Stern finissent par faire de « Jobs » un objet filmique particulièrement repoussant.
Anecdote : Un projet concurrent, écrit par le grand manitou Aaron Sorkin (considéré à raison comme l’un des meilleurs scénaristes actuels), épaulé par le vrai Steve Wozniak, crédité comme consultant, doit voir le jour prochainement et sera composé uniquement de trois scènes, chacune se déroulant en temps réel et correspondant à trois lancements de produits. De quoi mettre davantage l’eau à la bouche que le décevant « Jobs » !
La Bande Annonce de Jobs:
 
 
NOTE: 3,5/10

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