vendredi 30 août 2013

Ma vie avec Liberace

Steven Soderbergh a beau avoir pris sa retraite cinématographique, son nom n’en demeure pas moins sur toutes les lèvres actuellement. Premièrement, car son dernier (télé)film en date et dont il est question aujourd’hui, « Ma vie avec Liberace » (« Behind the Candelabra » en VO), est attendu en ouverture du Festival du cinéma américain de Deauville 2013, après avoir été présenté à Cannes en mai dernier. Secondo, car il développe en ce moment même une série télé très attendue, « The Knick », avec Clive Owen dans le rôle principal.
Produit par la chaîne câblée HBO, avec le soutien de Jerry Weintraub, fidèle collaborateur de Soderbergh, ce téléfilm dramatique, écrit par Richard LaGravenese, d’après la biographie « Behind the Candelabra : My Life with Liberace » de Scott Thorson, est le premier de l’histoire du Festival de Cannes à avoir concouru pour la Palme d’or. Reparti injustement bredouille de la Croisette, « Ma Vie avec Liberace » est aujourd’hui présenté hors compétition officielle à Deauville et sera suivi d’une masterclass du maître.
Synopsis Allociné : Avant Elvis, Elton John et Madonna, il y a eu Liberace : pianiste virtuose, artiste exubérant, bête de scène et des plateaux télévisés. Liberace affectionnait la démesure et cultivait l’excès, sur scène et hors scène. Un jour de l’été 1977, le bel et jeune Scott Thorson pénétra dans sa loge et, malgré la différence d’âge et de milieu social, les deux hommes entamèrent une relation secrète qui allait durer cinq ans. « Ma vie avec Liberace » narre les coulisses de cette relation orageuse, de leur rencontre au Las Vegas Hilton à leur douloureuse rupture publique.
Michael Douglas se serait-il fait chaparder son prix d’interprétation masculine à Cannes ? Probable, car l’acteur, déjà présent dans « Traffic » et « Piégée », autres œuvres de Soderbergh, livre une performance tout bonnement hallucinante, authentique vrai-faux sosie du célèbre pianiste virtuose Liberace, rôle un temps dévolu à Robin Williams (au début des années 2000, avec Philip Kaufman attaché à la réalisation). Matt Damon, qui interprète Scott Thorson, le compagnon amoureux de Liberace, n’est pas en reste cela dit et offre lui aussi une excellente partition en jeune garçon adopté en manque de repère et soumis au monde impitoyable du show business. Le comédien, qui a déjà travaillé à de nombreuses reprises avec Soderbergh (« Ocean’s Eleven », « The Informant », « Contagion »), est superbement dirigé par ce dernier, et témoigne du côté charnel et sincère de la relation.
« Ma Vie avec Liberace » est une comédie dramatique & romantique particulièrement réussie, portrait d’un personnage freak & chic mondialement reconnu – Liberace comptait parmi les musiciens les mieux payés de la planète – mais finalement si peu connu de son entourage. Avec beaucoup de brio et d’expérience, le caméléon Soderbergh lève aujourd’hui le secret sur cet amour tendre et sincère, n’hésitant pas à se mettre en danger en abordant de manière assez frontale l’homosexualité (pour rappel, le film a été jugé trop « gay » pour une sortie en salles aux Etats-Unis, et Soderbergh, malgré sa notoriété, n’a pas trouvé de distributeur sur le sol américain).
Sur le plan technique, il paraît impératif de saluer l’énorme travail de la chef costumière Ellen Mirojnick qui a réalisé les tenues de « Ma vie avec Liberace » (plus de 60 costumes dans la garde-robe de Damon & Douglas) et celui de Soderbergh directeur de photographie / monteur, crédité sous des pseudonymes, avec une reconstitution admirable des spectacles grandioses de l’époque, ou du cadre géographique dans lequel évoluait le talentueux musicien.
Bilan : Absent du palmarès de Spielberg en mai dernier, « Ma vie avec Liberace » est pourtant un téléfilm de goût et de qualité, noir et kitsch, qui fera certainement parler de lui avec le temps. A voir et à revoir !
Anecdote : Michael Douglas ayant juré abstinence totale au tabac lorsqu’il a appris la rémission de son cancer ORL, le script de « Ma vie avec Liberace » fut remanié de telle sorte à ce que l’on n’aperçoit pas le pianiste fumer, s’octroyant ainsi quelques libertés par rapport à la réalité de l’histoire.
La Bande Annonce de Ma vie avec Liberace:
 
NOTE: 8/10
 

Magic Magic

« Magic Magic » est le troisième film du réalisateur Sebastian Silva, mais son premier tourné en langue anglaise. Présenté en avant-première mondiale au Festival de Sundance, puis au Festival de Cannes en mai dernier, à la Quinzaine des Réalisateurs, ce thriller met en scène Michael Cera, Juno Temple et Emily Browning.
Synopsis Allociné : Pendant ses vacances au Chili, Alicia, une jeune américaine réservée, se retrouve embarquée par sa cousine Sara et sa bande d'amis sur une île isolée. Personne ne fait vraiment d'effort pour intégrer Alicia. Elle se replie de plus en plus sur elle-même et commence à perdre peu à peu ses facultés mentales sans que le groupe n'y prenne garde …
Un teen movie horrifique en quasi huit clos, sans menace, sans peur, et sans verser une seule goutte de sang ? Pari original et risqué mais relevé haut la main par Sebastian Silva.
« Magic Magic » raconte des vacances qui tournent mal, lorsqu'une des jeunes adultes de la bande commence progressivement à développer des symptômes délirants sans que personne ne s'en inquiète, puis se trouve confrontée à la paranoïa, l'isolement et l'exclusion au sein du groupe.
Probablement bercé dans sa jeunesse par des old Polanski's, « Répulsion », « Rosemary's Baby » et « Le Locataire », Sebastian Silva propose un long métrage étonnant, surprenant d'une part grâce aux effets de mise en scène, propices à la création d'une atmosphère étouffante et anxiogène – merci au passage à l'éblouissant travail de photo de Christopher Doyle, chef op' attitré de Wong Kar Waï, toujours réputé pour son exigence et son avant-gardisme, qui fournit ici un remarquable jeu de lumières et de couleurs en cascades – d'autre part, grâce au talent des comédiens, à commencer par son héroïne déréglée, Juno Temple.
Juno Temple poursuit en effet le chemin cinématographique tortueux et extrême (mise en danger de son corps), amorcé par sa présence chez Gregg Araki (« Kaboum ») ou chez William Friedkin (« Killer Joe »), dans un rôle de jeune femme prisonnière des arcanes de la folie. Il est vrai que l'actrice britannique est fort bien aidée par ses camarades (excellents Michael Cera et Emily Browning, à contre-emploi) et par Sebastian Silva, à la fois marionnettiste et illusionniste (les impressions subjectives orchestrées par des moyens purement artistiques).
Bilan : Un thriller paranoïaque Polanskien sombre et cruel, échafaudé grâce à l'ambiance déroutante mise en place par Silva et l'excellence des comédiens.
Anecdote : Avant d'être metteur en scène, Sebastian Silva a été 1er assistant – réalisateur pour « Avant la nuit » de Julian Schnabel, « Babel » d'Alejandro Gonzalez Inarritu et plus récemment « A la merveille » de Terrence Malick.
 
La Bande Annonce de Magic Magic:
 
 
NOTE: 7,5/10

jeudi 29 août 2013

Le Dernier pub avant la fin du monde

« The World's End », traduit bêtement « Le Dernier pub avant la fin du monde » en version française, conclut la « Trilogie Cornetto », instaurée par le génialissime « Shaun of the Dead » et poursuivie avec l'excellent buddy cop movie « Hot Fuzz ». Edgar Wright reprend les rênes de la réalisation, et signe également le scénario avec Simon Pegg. De l'autre côté de la caméra, le comédien anglais précédemment cité forme de nouveau le duo mythique avec son compère Nick Frost. Le trio, lancé grâce à la série anglaise « Spaced », parachève son aventure dans les salles aujourd'hui même.
Synopsis Allociné : L'histoire débute le 22 juin 1990 dans la petite ville anglaise de Newton Haven : cinq adolescents au comble de l'âge ingrat fêtent la fin des cours en se lançant dans une tournée épique des pubs de la ville. Malgré leur enthousiasme, et avec l'absorption d'un nombre impressionnant de pintes de bière, ils ne parviennent pas à leur but, le dernier pub sur leur liste : The World's End (La Fin du Monde). Une vingtaine d'années plus tard, nos cinq mousquetaires ont tous quitté leur ville natale et sont devenus des hommes avec femme, enfants et responsabilités, à l'alarmante exception de celui qui fut un temps leur meneur, Gary King, un quarantenaire tirant exagérément sur la corde de son adolescence attardée. L'incorrigible Gary, tristement conscient du décalage qui le sépare aujourd'hui de son meilleur ami d'antan Andy, souhaite coûte que coûte réitérer l'épreuve de leur marathon alcoolisé. Il convainc Andy, Steven, Oliver et Peter de se réunir un vendredi après-midi. Gary est comme un poisson dans l'eau. Le défi : une nuit, cinq potes, douze pubs, avec un minimum d'une pinte chacun par pub. À leur arrivée à Newton Haven, le club des cinq retrouve Sam, la sœur d'Oliver pour qui Gary et Steven en pincent toujours. Alors que la fine équipe tente, tant bien que mal, d'accorder le passé avec le présent, une série de retrouvailles avec de vieilles connaissances et des lieux familiers les font soudain prendre conscience que le véritable enjeu, c'est l'avenir, non seulement le leur, mais celui de l'humanité entière, et arriver à « La Fin du Monde » devient le dernier de leurs soucis …
Qui l'eût cru ? « The World's End » est probablement la meilleure comédie dramatique de science-fiction sociale et d'action de l'année. Un pastiche déjanté, drôle et émouvant de « L'Invasion des profanateurs de sépultures », qui marinerait dans la sauce « The Thing », assaisonné au piment british. Une poilade générale, orchestrée de main de maître par un metteur en scène brillant, biberonné depuis sa tendre enfance à la pop-culture.
Histoire simple au départ : des quadras prêts à s'enfiler des pintes jusqu'au douzième et dernier pub de la ville, à l'occasion d'un barathon disjoncté.
Toutes les vannes font mouche, l'écriture comique hyper dense et les gags graphiques sont parfaitement maîtrisés – la confrontation dialogues truffés de second degré / situations burlesques premier degré au premier plan est absolument divine – la profusion de détails geeks complètement jouissive. Les répliques délirantes à l'anglaise, ambiance « Monthy Pithon » en tête, fusent (« King Gay ») et débordent d'amusements en tout genre : plusieurs contrepètries barrées, humour pince-sans-rire, ou encore running-gag hilarant sur « Gary's Mum ».
Mais « The World's End » n'est pas seulement un rafraîchissant moment de franche rigolade, c'est aussi le déguisement de quelque chose nettement plus viscéral et construit, l'occasion pour les trois comparses de visiter des thématiques plus adultes et plus sombres. Au programme : exploration des conséquences du passage à l'âge adulte, de la dépendance à l'alcool, de ce qui forge la vie (l'amitié, les amours, les responsabilités...) et ce qu'on choisit d'être. Certains propos déjà abordés en toile de fond dans « Shaun of the Dead » et « Hot Fuzz » – la peur du changement, le refus de l'homogénéisation et la lutte contre le conformisme – sont ici davantage creusés et toujours on ne peut plus d'actualité.
Le jeune prodige trentenaire Edgar Wright, également auteur du chef d'œuvre pop musical « Scott Pilgrim » en aparté, fonctionne à plein régime dans sa mise en scène ahurissante : effets de montage façon Guy Ritchie, rythme endiablé, narration fluide et transitions variées, scènes d'action spectaculaires (le climax notamment) …
Côté interprétations, on assiste à une admirable réunification de tous ceux qui avaient participé aux précédents volets, les vieux potes Simon Pegg & Nick Frost bien évidemment (parfaits as usual, voire mieux encore, les deux loustics parviennent à nous surprendre en réinventant totalement la bromance, la relation entre leurs personnages changeant en fait du tout au tout entre chaque épisode), mais aussi Martin Freeman (starisé entre temps grâce à la série « Sherlock » et la trilogie « Hobbit »), Rafe Spall, Paddy Considine, Julia Deakin, Patricia Franklin, les jumeaux Kevin et Nicholas Wilson, ainsi que Bill Nighy. Les petits nouveaux s'appellent Eddie Marsan, Rosamund Pike, ou encore l'ex-James Bond Pierce Brosnan (clin d'œil volontaire à « Hot Fuzz », rappelez-vous en effet la présence de Timothy Dalton au générique). Autrement dit, une pléthore de comédiens talentueux et tous plus vivants les uns que les autres.
Une BO aux petits oignons (The Doors, Pulp, Stone Roses, Kylie Minogue …) constituant un personnage à part entière et faisant progresser le récit tel un jukebox, des références à gogo (« les fameuses palissades, récurrentes dans les trois films, qui sans être un simple élément du décor, servent toujours à la narration et surtout à l'insertion d'un gag culte »), des influences venues d'ailleurs (John Carpenter pour le cinéma, les auteurs John Wyndham et John Christopher côté littérature), des combats « Drunken Master » en forme d'hommage au zui quan (la boxe de l'homme ivre) de Jackie Chan (présent dans les remerciements au générique, CQFD) sont indéniablement de précieux atouts, et permettent à « The World's End » d'atteindre les sommets.
Bilan : Edgar Wright, Simon Pegg et Nick Frost enrichissent encore un peu plus le patrimoine du cinéma anglais avec « The World's End », niche SF sociale intelligente et bouleversante, véritable maillon manquant à la chaîne filmique initiée par le film zombie « Shaun of the Dead » et la comédie d'action « Hot Fuzz ».
Anecdote : De nombreuses personnalités du 7è art ont complimenté le film et son réalisateur Edgar Wright via leur compte Twitter personnel ou bien en interviews. Parmi les célébrités totalement emballées, on recense : Joss Whedon, Robert Downey Jr, Greg Mottola, Duncan Jones, Rian Johnson, Joe Carnahan, Chris Evans, Ben Stiller, John Landis, Joe Dante, Adam McKay, Alison Brie, Dwayne Johnson, Peter Jackson, Seth Green, Patton Oswalt, Judd Apatow, Patrick Wilson, Damon Lindelof, Alfonso Cuaron, Brad Bird, Joel McHale, Gillian Jacobs, Jamie Bell et James Gunn.
La Bande Annonce du Dernier pub avant la fin du monde:
 
 
NOTE: 10/10

mercredi 28 août 2013

Une place sur la terre

Benoît Poelvoorde dans un registre tragico-comique, c’est généralement plutôt de bon augure. En témoigne la riche filmographie du trublion belge dans ce domaine : les collaborations avec Anne Fontaine évidemment (« Coco avant Chanel », « Entre ses mains »), mais aussi « Les Emotifs anonymes », ou encore « Quandje serai petit », voire même le récent « Grand méchant loup ». Satisfaction donc de le retrouver en tête d’affiche d’« Une place sur la terre », nouveau long métrage de Fabienne Godet.
Synopsis Allociné : Antoine, photographe joyeusement désabusé, a pour seul ami Matéo, le jeune fils de sa voisine souvent absente, auquel il donne une éducation fantaisiste. Un matin, des notes de piano venues de l’immeuble d’en face captent son attention. Antoine ne sait pas encore que celle qui les joue, Elena, étudiante idéaliste et sans concession, va bouleverser sa vie et lui permettre enfin de trouver une place sur la Terre …
« Une place sur la terre » est un drame humain tendre et généreux, rarement mélo (ou juste ce qu’il faut) et truffé de répliques nihilistes croustillantes.
Benoît Poelvoorde y est magistral en artiste écorché mais amoureux, Ariane Labed convaincante dans cette interprétation d’idéaliste suicidaire. Fabienne Godet, de son côté, propose une mise en scène à la fois délicate et attentionnée, la photographie y est par exemple particulièrement soignée. Peu de dialogues, beaucoup de visages, de regards, de gestes. De la place pour ses personnages et une belle romance, en somme !
Bilan : Du cinéma français exigeant qui sort des sentiers battus, un peu à la manière du « Temps de l’aventure » il y a quelques mois, recevable grâce à l’excellente partition de Benoît Poelvoorde, noir et câlin à la fois. Dommage néanmoins que le film de Fabienne Godet n’échappe pas à quelques clichés itinérants sur l’art et l’amour.
Anecdote : Lassé du milieu du cinéma, Benoît Poelvoorde n’a cessé d’annoncer sa retraite en tant qu’acteur. Ce n’est manifestement pas encore pour tout de suite car le comédien incarnera l’un des deux malfrats se préparant à enlever contre rançon le cercueil de Charlie Chaplin dans le nouveau film de Xavier Beauvois, « La rançon de la gloire », attendu pour 2014.
 
La Bande Annonce d'Une place sur la terre:
 
 
NOTE: 6,5/10

Red 2

Dans la fournaise des blockbusters estivaux qui ont fait un giga bide au box-office us, je demande « Red 2 », suite (logique) du joli succès – surprise – de 2010 « Red ». On prend les mêmes et on recommence. Ou presque, puisque Robert Schwentke cède son poste de réalisateur à Dean Parisot (« Galaxy Quest », « Braqueurs amateurs »), que Morgan Freeman et Karl Urban ont disparu entre temps, et que Catherine Zeta-Jones, Anthony Hopkins & Brian Cox sont les nouveaux venus. 
Synopsis Allociné : Lorsque l'agent retraité de la CIA Franck Moses apprend la mort de son ancien collègue Marvin, il se rend à son enterrement avec sa compagne Sarah, sans se douter qu'il va au-devant de gros problèmes … Arrêté et interrogé par le FBI au sujet du mystérieux « Projet Nightshade », il ne doit son salut qu'à l'intervention de Marvin qui avait simulé sa mort. Ils se lancent alors dans une course à travers le monde pour découvrir le secret du « Projet Nightshade ».
Une intrigue foireuse, écrite sur un coin de table, axée autour de la recherche d'une bombe au mercure qui pourrait zigouiller les habitants d'une ville entière, prétexte à un nouveau rassemblement des retraités à travers Paris, Londres et la Russie. Des acteurs usés (Bruce Willis, Catherine Zeta-Jones) ou en roue libre (John Malkovich, Helen Mirren, Anthony Hopkins, Brian Cox, Mary-Louise Parker). Des situations convenues, des rebondissements ultra prévisibles, des dialogues rétro maladroitement forcés …
Oui, mais pourtant, il faut avouer que la magie opère (parfois). Grâce à l'humour cynique ravageur de John Malkovich sans doute, dans la peau d'un agent rustre et loufoque aux répliques cinglantes (hilarant « Ce qui se passe au Kremlin reste au Kremlin »), mais aussi grâce à l'admirable sens d'auto-dérision d'Helen Mirren, qui s'amuse comme une folle à se débarrasser de cadavres avec de l'acide, ou peut être grâce au talentueux Lee Byung-hun qui contribue à une relative valeur ajoutée côté bastons.
Bilan : « Red 2 » vaut surtout pour sa belle brochette d'acteurs, en freestyle complet, qui semblent s'éclater. Le reste (trame scénaristique, mise en scène, montage, musique, rebondissements, scènes d'action spectaculaires) est en pilotage automatique et finit par lasser.
Anecdote : Lors d'un passage du film, Helen Mirren déclare être la reine d'Angleterre afin d'être interné dans un hôpital psychiatrique, fait plutôt amusant quand on sait que l'actrice anglaise a récemment été récompensée de l'Oscar de la meilleure actrice pour son rôle d'Elizabeth II dans « The Queen » de Stephen Frears.
La Bande Annonce de Red 2:
 
 
NOTE: 4,5/10
 
 

mardi 27 août 2013

L'Aube rouge (2012)

« L’Aube rouge (2012) », remake du film éponyme de 1984 réalisé par le vétéran John Milius, est resté dans les cartons du studio distributeur pendant près de trois ans (tournage achevé en 2009, sortie prévue initialement fin 2010, mais finalement repoussée à cause des problèmes financiers rencontrés par la MGM à ce moment-là). Revenu d’entre les morts à l’automne dernier aux USA, profitant ainsi au maximum de la notoriété grandissante de ses deux acteurs principaux, Chris Hemsworth & Josh Hutcherson, cette version 2012, mise en boîte par Dan Bradley – réalisateur de seconde équipe ou coordinateur des cascades sur les franchises « James Bond », « Jason Bourne » et « Spider-Man » – débarque seulement maintenant dans nos contrées, ce mercredi 28 août 2013, face à « Red 2 » et « Le Dernier pub avant la fin du monde ».
Synopsis Allociné : Un matin, les habitants d’une ville américaine se réveillent pour découvrir l’incroyable : des forces armées étrangères sont en train de les envahir. Les Etats-Unis sont attaqués, des centaines de parachutistes pleuvent du ciel, et ce n’est que le début … Très vite, des citoyens sont faits prisonniers et l’ennemi occupe le secteur. Un groupe de jeunes parvient à s’enfuir et se cache dans les bois. Ils n’ont pas dit leur dernier mot. Il n’est pas question pour eux de se laisser voler leur liberté et leur pays …
Démarrage au quart de tour pour cette « Aube rouge », après un montage d’introduction – nerveux – sous forme de reportage TV exposant les retombées directes de la crise économique sur les pays membres de l’Union Européenne, ainsi qu’une OTAN affaiblie, alors qu’une coopération accrue se développe entre une Corée du Nord de plus en plus belliqueuse et une Russie dirigée par des ultranationalistes.
Sauf que si « L’Aube rouge » n’est pas tout à fait la méga daube annoncée, ce remake, efficace par moments, n’en demeure pas moins qu’un triste prétexte à une série B décérébrée, honteusement prévisible, aux enjeux très maigres, et ligotée par des scènes d’action, certes spectaculaires, particulièrement bien shootées et fortement inspirées par « Call of Duty : Modern Warfare » (les jeunes rebelles décident d’ailleurs de baptiser leur groupe de résistance ‘Les Wolverines’ en référence au jeu vidéo de guerre, CQFD), mais bien trop abondantes et bêta.
Nous aurions pu nous douter du traquenard dès le départ à vrai dire, devant ce postulat idiot d’une invasion des Etats-Unis via l’envahissement d’un village militaire paumé par les forces armées de Corée du Nord. Anguille sous roche également lors de la révolte des citoyens faits prisonniers, transformés en « Rambo » va savoir comment.
Chris Hemsworth se démène comme il peut dans la peau du leader du groupe de résistance, et arrive à limiter la casse. A ses côtés, Isabel Lucas & Adrianne Palicki jouent les potiches, Josh Hutcherson manque de charisme, le fils Cruise (Connor, l’aîné adopté par l’ex-couple Kidman / Cruise) use mal de son piston.
Bilan : Loin d’être irregardable, ce remake, efficient par instants grâce au savoir-faire de son metteur en scène Dan Bradley, ne restera tout de même pas dans les annales. Exit le patriotisme et l’arrière-propos politique de l’original, il est seulement question aujourd’hui d’enchaîner les pétarades mongolo-bourrines à tire-larigot.  
Anecdote : Le scénariste de ce remake n’est autre que Tony Gilroy, plume derrière la saga cinématographique « Jason Bourne ».
La Bande Annonce de L'Aube Rouge (2012):
 
 
NOTE: 4/10

lundi 26 août 2013

Jobs

A la minute où la mort de Steve Jobs fut officialisé partout dans les médias, on se doutait bien qu’un biopic – œuvre cinématographique de fiction centrée sur la description biographique d’un personnage principal ayant réellement existé –  allait pointer le bout de son nez. Ce dont on ne se doutait point et qui surprit tout le monde fut le choix du comédien Ashton Kutcher pour incarner le co-fondateur emblématique de la marque Apple. Aux commandes de ce projet alléchant, Joshua Michael Stern, un novice, ou presque, puisqu’on peut lire dans son CV seulement trois œuvres méconnues en tant que scénariste / réalisateur : « Neverwas » en 2005, « Swing Vote » en 2008 et « Carnaval » en 2011. Et donc le fameux « Jobs » qui nous intéresse aujourd’hui.  
Synopsis Allociné : Partout sur la Terre, Steve Jobs est célébré comme un créateur de génie dont les inventions ont révolutionné notre façon de vivre et de percevoir notre monde. Il est aussi connu comme l’un des chefs d’entreprise les plus charismatiques et les plus inspirants qui soient. Mais qui connaît l’homme derrière l’icône ? Qui sait quel parcours humain se cache derrière la destinée de ce visionnaire d’exception ? De l’abandon de ses études universitaires au formidable succès de sa société, voici l’incroyable ascension de Steve Jobs, co-créateur d’Apple Inc., l’un des entrepreneurs les plus créatifs et respectés du XXIè siècle.
 
Après Mark Zuckerberg, c’est au tour de Steve Jobs d’avoir droit à son biopic. Sauf que n’est pas David Fincher (ou Aaron Sorkin ou Jesse Eisenberg) qui veut. Après l’accueil triomphal réservé à « The Social Network », il semblait évident que le monde informatique allait créer des émules. La comédie « Les Stagiaires » fut la première à surfer sur la vague du succès en prenant pour cadre la célèbre firme de Mountain View « Google ». C’est aujourd’hui à nouveau le cas avec « Jobs ».
Commençons par les quelques points forts du film de Joshua Michael Stern : tout d’abord, l’immersion au sein de la Silicon Valley des années 70, avec l’arrivée aux foyers des premiers ordinateurs personnels. Le spectateur assiste ainsi à la camaraderie naissante entre les deux Steve : Steve Wozniak, campé avec métier par Josh Gad, et Steve Jobs, incarné par un Ashton Kutcher qui a manifestement bûché de longues heures devant son miroir (mais cela suffit-il ?). Le premier bidouille un appareil révolutionnaire dans le salon en assemblant quelques composants achetés à la boutique du coin de la rue lorsque le second y voit un potentiel gigantesque et le pousse à présenter sa création à des investisseurs.
C’est après que ça se gâte lorsque Joshua Michael Stern choisit de montrer l’icone de la génération iPod sous un jour nouveau : celui de la tyrannie. Le réalisateur nous déballe le côté impitoyable de Steve Jobs sans vergogne, alignant les scènes (répétitives) de crises de nerf du bonhomme contre ses employés qu’il ne juge pas assez impliqués, ou ses coups de sang lorsqu’il refuse de reconnaître sa fille Lisa, laissée aux bons soins d’une mère désespérée.
Les vrais intérêts et enjeux d’un film autour d’une telle figure sont dès lors éclipsés – les créations du génie à peine présentées, un comble ! – ou survolés – la compétition avec le géant Microsoft abordée le temps d’une scène d’échange téléphonique avec Bill Gates.
Il faut avouer que la composition musicale de Lucas Vidal répondant au conformisme de mise avec des violons poussifs, la photographie de Russell Carpenter qui fait la part belle à Ashton Kutcher, et l’écriture terriblement académique, ne faisant qu’uniformiser l’ensemble à l’aide de répliques exécrables, n’aident en rien. Un exemple : « On ne peut pas regarder la compétition et dire qu’on fera mieux. On regarde la compétition et on dit qu’on fera différemment ». Comme si le metteur en scène anticipait sur le devenir gif de son film, le faisant avancer comme une moissonneuse batteuse sur la voie lourdement tracée du long métrage à messages.
Et que dire de la fin de « Jobs ». Le film explose, en effet, en plein vol et s’arrête au beau milieu de l’histoire de la Pomme, au chapitre où le fondateur de la célèbre société fait face aux défis les plus passionnants de sa vie. Quel dommage !
Bilan : Un biopic frileux qui se contente de surfer sur la vague du succès « The Social Network », le talent en moins. Si Ashton Kutcher assure le job en Jobs, le scénario incroyablement frustrant et la mise en scène pantouflarde de Joshua Michael Stern finissent par faire de « Jobs » un objet filmique particulièrement repoussant.
Anecdote : Un projet concurrent, écrit par le grand manitou Aaron Sorkin (considéré à raison comme l’un des meilleurs scénaristes actuels), épaulé par le vrai Steve Wozniak, crédité comme consultant, doit voir le jour prochainement et sera composé uniquement de trois scènes, chacune se déroulant en temps réel et correspondant à trois lancements de produits. De quoi mettre davantage l’eau à la bouche que le décevant « Jobs » !
La Bande Annonce de Jobs:
 
 
NOTE: 3,5/10