dimanche 30 décembre 2012

Possédée

Ole Bornedal, réalisateur danois qui a fait ses preuves à Hollywood avec le remake cheap mais efficace de son propre film, « Le veilleur de nuit », met en scène aujourd'hui le film d'horreur « Possédée ». Enième frisson sur le thème de la possession, ou véritable œuvre originale et terrorisante ? Le dilemme inclus dans cette question est renforcé par la présence au générique de Sam Raimi, officiant ici en qualité de producteur via sa société « Ghost House Pictures ».
Synopsis (source : Allociné) Clyde et Stephanie Brenek ne voient pas de raison de s'inquiéter lorsque leur fille cadette Em devient étrangement obsédée par un petit coffre en bois acheté lors d'un vide grenier. Mais rapidement, son comportement devient de plus en plus agressif et le couple suspecte la présence d'une force malveillante autour d'eux. Ils découvrent alors que la boîte fut créée afin de contenir un Dibbuk, un esprit qui habite et dévore finalement son hôte humain.
Ne laissons pas mijoter le suspens : « Possédée » n'est pas vraiment flamboyant et lorgne plutôt sur les rives du long métrage complètement raté, tendance mauvais épisode « Chair de poule ». Ladite « possession » est traitée de manière archi caricaturale, usant comme objets de peur les artifices du genre déjà éculés des centaines de fois auparavant : enfants démoniaques, tempos de piano des nombreux jump-scares, amis fantomatiques des bambins, reflets dans le miroir censés provoquer la crainte, néons stroboscopiques d'une morgue ...
Il faudrait chercher la pseudo-inventivité plutôt du côté des origines juives du démon en cause, mais on est rapidement freiné par le nom totalement ridicule et abject de ce dernier : « Abyzou ». Un bisou ? Non, non, A-B-Y-Z-O-U !
Scénario bâclé et ultra prévisible allant jusqu'à pêcher sur des eaux conquises depuis belle lurette (sacrifice du père protecteur, transfert de corps de la force démoniaque, fin ouverte vers un second opus) rythme de fond irrégulier, gavage d'effets spéciaux tue-la-terreur, acteurs incapables d'aligner plus de deux mimiques, mise en scène dénuée saveur avec une fin pathétique, polluée d'un exorcisme juif, à grand renfort d'incohérences (« L'huile représente la Lumière et l'eau les ténèbres » euh !) … pas grand chose à sauver du naufrage dès les premières minutes de pelloche.
Les présences au casting de l'indéboulonnable charmeur Jeffrey Dean Morgan (« Grey's Anatomy », « PS : I love you ») et de la fortement BOTOXée Kyra Sedgwick ne permettent guère de réhabiliter l'affaire avec un jeu proche du saugrenu et du risible.
Demeure une unique tentative de créativité à reconnaître s'agissant du montage de l'ensemble, un ensemble ponctué de plans zénithaux constructifs.
Bilan : Sam Raimi & OleBornedal accouchent d'un film fantastique, score 0 sur l'échelle de la frousse, flanqué d'acteurs mal dirigés et poussifs. On espère désormais, même si c'est mal barré, que la moisson de billets verts récoltés cet été au box office américain ne fera pas tourner la tête de l'équipe vers une sequel.
 
 
La Bande Annonce de Possédée:
 
 
NOTE: 1/10

mercredi 26 décembre 2012

Jack Reacher

« Jack Reacher » est un film policier américain beaucoup plus malin qu'il n'y paraît. Adaptation sur grand écran des aventures de Jack Reacher, issu du best seller « Folie furieuse » (One Shot en version originale) de l'auteur Lee Child, le long métrage de Christopher McQuarrie, à qui l'on doit tout de même le scénario de « Usual Suspects » et qui enfile ici la double casquette de scénariste / réalisateur, se fait rebaptiser sobrement « Jack Reacher » pour sa transposition cinématographique.
Rappelez-vous cette fameuse légende urbaine hollywoodienne qui veut qu'un film avec un héros dont la première lettre du prénom commence par un J devienne instantanément synonyme de succès au box office : James Bond, Jason Bourne, John McClane, John Rambo … Simple coïncidence ou signe de la providence, il n'empêche que la Paramount, Paula Wagner et Tom Cruise, imbus du carton planétaire du dernier volet de « Mission Impossible » l'année dernière à la même période, voudraient bien réitérer l'exploit, et lancer, pourquoi pas, une nouvelle franchise d'action aux initiales emblématiques, capables de phagocyter l'inconscient collectif.
Synopsis (source : Allociné) Un homme armé fait retentir six coups de feu. Cinq personnes sont tuées. Toutes les preuves accusent l'homme qui a été arrêté. Lors de son interrogatoire, le suspect ne prononce qu'une phrase : « Trouvez Jack Reacher. » Commence alors une haletante course pour découvrir la vérité, qui va conduire Jack Reacher à affronter un ennemi inattendu mais redoutable, qui garde un lourd secret.
Vendu bêtement comme le « nouveau blockbuster de Tom Cruise à la sauce Mission Impossible » par une bande annonce mensongère, « Jack Reacher » n'est pas le film testostéroné attendu. Il n'en demeure pas moins la vraie surprise de cette fin d'année 2012. D'une facture d'apparence classique, ce thriller recèle pourtant un bijou d'anthologie cinématographique, avec un véritable hommage (déguisé) aux films de Sidney Poitier (on pense à « Dans la chaleur de la nuit » en premier lieu), et aux polars d'action du début des 90's signés Alan J.Pakula / John McTiernan, ainsi que des moments d'humour insoupçonné articulés autour de punchlines cyniques qui font mouche.
Bénéficiant de la présence de Christopher McQuarrie, homme qui a fait ses armes, pour rappel, il y a une dizaine d'années avec le sous-estimé « The Way of the Gun », la mise en scène de ce « Jack Reacher » est percutante, gorgée de scènes bien senties, grâce notamment à un montage sonore absolument jouissif composé de ronronnements de moteur de la Chevelle lors de la Cruise poursuite - une course épique et très inspirée par la saga vidéo-ludique Grand Theft Auto - ainsi que l'essaim des balles de sniper fusant lors d'une séquence digne des plus belles scènes de « Stalingrad ».
Balancé sur un rythme de fond rappelant plutôt « Drive » que Michael Bay, le scénario malicieux de « Jack Reacher » permet surtout de mettre en lumière un héros charismatique, hybride de Charles Bronson et de Sidney Poitier, au passé mystérieux, incarné par le Tom Cruise d'antan, pour le moins en forme et toujours aussi superbe. La présence de Robert Duvall, dans le rôle de l'éternel mentor en qualité de témoin de la complicité nouée entre les deux hommes, appuie parallèlement la volonté du metteur en scène de jouer à fond la carte du clin d'œil aux précédentes moutures du genre.
Là où « Jack Reacher » pêche, c'est en revanche du côté de l'autre partie du casting, avec une Rosamund Pike minaudant à souhait, aux apparitions surjouées, qui nous refait la sauce « Meurs un autre jour », ainsi qu'un Jai Courtney peu crédible, inapte à crever l'écran, en jeune bras droit du bad guy, interprétation qui n'augure rien de bon pour le prochain opus Die Hard à venir (l'acteur doit y jouer le rejeton McClane). Nous sommes enfin étonnés de la présence au générique du réalisateur allemand Werner Herzog, bien perdu en vilain au dessein incompréhensible, et cabotinant à plein tube.
Un autre défaut, pardonnable, n'ayez crainte, quelques longueurs qui font parfois perdre confiance à l'ensemble.
Bilan : A 50 ans, l'ex-mari de Katie Holmes est encore capable de surprendre. Ce « Jack Reacher » est, en effet, la pépite cinématographique post-fin du monde, à la fois très astucieuse et démonstratrice d'un héros rusé, doué d'un pouvoir de séduction incroyable. On espère secrètement un second épisode.
 
La Bande Annonce de Jack Reacher:
 
 
NOTE: 7/10
  


L'homme qui rit

Gérard Depardieu quitte certes la France, mais ne semble pas vouloir abandonner ses classiques pour autant, puisqu'on le retrouve aujourd'hui sur notre territoire cinématographique dans le rôle principal de « L'homme qui rit », adaptation sur grand écran du chef d'œuvre littéraire de Victor Hugo, réalisé par Jean-Pierre Améris.
Synopsis (source : Allociné) En pleine tourmente hivernale, Ursus, un forain haut en couleurs, recueille dans sa roulotte deux orphelins perdus dans la tempête : Gwynplaine, un jeune garçon marqué au visage par une cicatrice qui lui donne en permanence une sorte de rire, et Déa, une fillette aveugle. Quelques années plus tard, ils sillonnent ensemble les routes et donnent un spectacle dont Gwynplaine, devenu adulte, est la vedette. Partout, on veut voir 'L'homme qui rit', il fait rire et émeut les foules. Ce succès ouvre au jeune homme les portes de la célébrité et de la richesse et l'éloigne des deux seuls êtres qui l'aient toujours aimé pour ce qu'il est : Déa et Ursus.
Jean-Pierre Améris, réalisateur français à qui l'on doit les clinquantes « Mauvaises fréquentations » et le doux amer « Les Emotifs anonymes », revisite cette fois l'univers de Victor Hugo, l'assaisonne à la sauce Terry Gilliam, et livre un long métrage ambitieux au casting hétérogène.
Sur le plan de la transposition, « L'homme qui rit » se révèle une adaptation cinématographique fidèle aux thématiques chères à Hugo : la confusion dans la distinction entre l'Homme et l'Animal, l'allégorie du chaos vaincu et du peuple souffrant, la dichotomie des classes sociales …
On pense évidemment à « L'Imaginarium du Docteur Parnassus » et à son monde fantaisiste et coloré, mais également à l'univers de Burton, avec ses décors sortis d'un imaginaire farfelu, ainsi qu'une bande originale sur des notes proches de celles de Danny Elfman. Malgré l'exploitation de ces modèles américains, la mise en scène d'Améris manque de brio, on reste sur sa faim !
Le personnage balafré, dont on se demande s'il n'est pas coupable d'avoir inspiré l'ennemi numéro 1 de Batman, est incarné par un Marc-André Grondin bancal, tantôt inspiré, tantôt mauvais. Christa Théret confirme en Déa tout le bien qu'on pensait d'elle depuis sa révélation dans « LOL » quand notre Gégé national, monstre sacré du paysage cinématographique hexagonal, poursuit son interminable carrière au sommet. À dénoncer, l'affreuse prestation d'Emmanuelle Seigner inexpressive dans sa palette d'actrice. Enfin, saluons le trop rare Serge Merlin, inoubliable homme de verre du « Fabuleux destin d'Amélie Poulain » et impeccable ici en chambellan Barkilphedro.
Bilan : Pas si mal que ça, mais un manque de profondeur dans l'adaptation de ce classique de Victor Hugo par Jean-Pierre Améris. À consommer sans modération pour les bachoteurs 2013 !
 
La Bande Annonce de L'homme qui rit:
 
 
NOTE: 5,5/10

jeudi 20 décembre 2012

L'Odyssée de Pi

Dieu seul sait que l'on trépignait d'impatience pour découvrir « L'Odyssée de Pi » au cinéma.
Pour plusieurs raisons. En premier lieu, parce que réputée initialement inadaptable pendant près d'une décennie, l'œuvre littéraire « Histoire de Pi » de Yann Martel est ensuite passée entre les mains des plus grands réalisateurs contemporains, notamment dans celles de M. Night Shyamalan, d'Alfonso Cuaron et de notre Jean-Pierre Jeunet national, avant d'échouer dans les pattes du sage Ang Lee.
Deuxième motif de l'attente : les multiples buzz médiatiques autour du projet, d'abord la magnifique bande annonce sur les notes musicales du « Paradise » de Coldplay, puis l'encensement du long métrage (et de sa 3D of course) par le roi hollywoodien James Cameron en personne. C'est donc après dix ans de gestation que « L'Odyssée de Pi » sort enfin dans les salles, s'apprêtant à charmer le public, après avoir déjà conquis les critiques des deux côtés de l'Atlantique.
Synopsis (source : Allociné) Après une enfance passée à Pondichéry en Inde, Pi Patel, 17 ans, embarque avec sa famille pour le Canada où l'attend une nouvelle vie. Mais son destin est bouleversé par le naufrage spectaculaire du cargo en pleine mer. Il se retrouve seul survivant à bord d'un canot de sauvetage. Seul, ou presque …Richard Parker, splendide et féroce tigre du Bengale est aussi du voyage. L'instinct de survie des deux naufragés les fera vivre une odyssée hors du commun au cours de laquelle Pi devra développer son ingéniosité et faire preuve d'un courage insoupçonné pour survivre à cette aventure incroyable.
On connaissait depuis longtemps la poésie et la sérénité d'Ang Lee (cf le somptueux et majestueux « Tigre et dragon », ou encore « Le Secret de Brokeback Mountain » qui, l'année de sa sortie, valut à Lee l'Oscar du meilleur réalisateur), ainsi que l'admirable passion qu'il met en œuvre pour la conception d'objets cinématographiques atypiques. « L'Odyssée de Pi » marque un tournant dans sa carrière, puisque le metteur en scène taïwanais décroche la timbale et propose un véritable chef d'œuvre. Lee, en alliant parfaitement le pouvoir de la fiction et celui de l'imagination, rejoint ainsi le panthéon de ces magiciens du septième art (Spielberg et Burton en tête) pour qui la doctrine « croire...c'est voir » (et non l'inverse!) enrichit tous les jours un peu plus le patrimoine mondial du cinéma.
Son récit épique, renversant et remarquablement bien écrit (chapeau au roman de Martel et au travail d'adaptation scénaristique de David Magee) d'un adolescent indien mettant à profit son courage pour braver tous les dangers - le naufrage, la tempête, le deuil de ses proches, l'affrontement de l'inconnu et la survie - et qui se lie d'amitié avec un tigre transcende le spectateur.
De même, les incalculables métaphores (animales notamment) magnifient l'histoire et engendrent chez le public de bouleversantes émotions. La fin se charge, quant à elle, d'élargir les pensées inconscientes du spectateur pour le laisser choisir délibérément le merveilleux au réel.
Ce n'est pas seulement un conte poignant auquel nous assistons, nous sommes en effet à bord du radeau aux côtés de Pi et de son compagnon félin, nous vivons l'épopée magique avec eux. Oui magique ! Il serait impardonnable de ne pas saluer l'excellent travail de Lee et de son chef op' sur l'aspect visuel du film, éblouissant et agrémenté d'un spectacle foudroyant sur chaque plan. Jamais une 3D n'avait été aussi enrichissante et fluide depuis celle d'« Avatar ». 
Parlons casting : Suraj Sharma se dévoile saisissant dans le rôle du jeune héros, à la fois fougueux et terriblement zen, paré à l'aventure. L'empathie fait rage.
Enfin, quelques mots sur la faune et particulièrement sur le prodigieux tigre du Bengale, paraissant tellement réel qu'il nous incite à vérifier son origine synthétique.
Bilan : Merveille de réalisation et d'humilité pour Ang Lee qui signe ici sa plus belle œuvre. L'illusionniste asiatique met en scène une affaire parfaite en tout point, notamment sur le plan visuel et narratif.
La Bande Annonce de L'Odyssée de Pi:

NOTE: 9,5/10

mercredi 19 décembre 2012

Main dans la main

Un an à peine environ après qu’ils aient réussi à surprendre tout le monde en faisant valser tant les critiques que le public avec leur surestimé « Guerre est déclarée », Valérie Donzelli & Jérémie Elkaïm se retrouvent derrière (pour Donzelli) et face caméra (pour les deux partenaires) pour leur nouveau film, « Main dans la main », propulsé par ailleurs par une bande annonce électrisante sur fond sonore pop et sympathique via le titre « Electricity » du groupe « Orchestral Manoeuvres in the Dark ». 
 
Synopsis (source : Allociné) Quand Hélène Marchal et Joachim Fox se rencontrent, ils ont chacun des vies bien différentes. Hélène dirige la prestigieuse école de danse de l’Opéra Garnier, Joachim, lui, est employé d’un miroitier de province. Mais une force étrange les unit. Au point que, sans qu’ils puissent comprendre ni comment, ni pourquoi, ils ne peuvent plus se séparer.
A la manière de Noémie Lvovsky et son « Camille Redouble » récemment, on devine l’espoir - faussement naïf - chez Donzelli de reproduire le carton de l’an dernier avec cette comédie douce amère au concept certes frais, original et paranormal, mais finalement très mal acheminé.
Seulement voilà, hormis quelques bonnes idées de mise en scène par ci par là, le style reportage notamment, avec ses agréables voix offs et sa pellicule nostalgique granitée par moments, le film de Donzelli souffre d’indénombrables défauts, quasi calqués sur ceux de « La Guerre est déclarée », mais tolérés à l’époque du fait de la naïveté de sa réalisatrice (n’oublions pas que « La Guerre est déclarée » était seulement son second long métrage).
Aujourd’hui, l’eau a coulé sous les ponts, et le mauvais jeu d’acteurs du tandem devient difficilement pardonnable. Car, en effet, Donzelli joue toujours aussi mal, et son coéquipier, pourtant aguerri à l’exercice par la fréquentation de quelques ténors dans « Polisse », ne fait malheureusement pas mieux que son ex-compagne, trahi par un personnage trop intello et obséquieux, non crédible. On n’avait rarement vu une comédie aussi lourdement interprétée où même les seconds couteaux semblent complètement déboussolés. Lemercier fait son possible pour sauver les meubles dans son rôle de directrice d’école de danse, mais n’enchante guère au milieu du troupeau, sauf évidemment lors de l’hilarante scène dénudée.
  
« Mais dans la main », bien que pimenté de dialogues savoureusement comestibles qui sauvent un peu la mise, est par ailleurs ponctué de séquences de danse bas de gamme, maladroites et sans surprises, inapte à rivaliser avec le modèle américain, beaucoup plus envoûtant, « Black Swan ».
Enfin, retenons en mémoire une durée de bobine déconcertante (1h25) à l’heure où le standard impose plutôt un minimum syndical d’1h45.
En bilan : « Main dans la main » déçoit par ses acteurs horripilants et tous plus irritants les uns que les autres, ainsi que par des séquences de danse ratées et dénuées de saveur.
Essai non transformé pour la paire Donzelli / Elkaïm. Laissons quand même une chance pour un quatrième opus. On verra bien !


NOTE: 4,5/10

lundi 17 décembre 2012

Les Bêtes du sud sauvage

Après avoir raflé un prix à chaque présentation lors des festivals où il était projeté (Triomphe à Sundance, Caméra d'or à Cannes, Grand Prix à Deauville), affirmer que le premier long métrage du jeune réalisateur de 29 ans Benh Zeitlin était attendu, relève de l'euphémisme. C'est donc dans ce contexte de buzz enthousiaste que débarque dans les salles aujourd'hui, « Les Bêtes du sud sauvage », par ailleurs adulé par le président Obama lui même, c'est dire !
Synopsis (source : Allociné) Hushpuppy, 6 ans, vit dans le bayou avec son père. Brusquement, la nature s'emballe, la température monte, les glaciers fondent, libérant une armée d'aurochs. Avec la montée des eaux, l'irruption des aurochs et la santé de son père qui décline, Hushpuppy décide de partir à la recherche de sa mère disparue.
Le jeune New-Yorkais Zeitlin expliquait récemment que c'est au cours du visionnage de « Underground » de Kusturica que lui vint le déclic de faire du cinéma pour « continuer à inventer sa propre réalité ». Bien lui en a pris puisqu'il signe aujourd'hui un premier long sulfureux et très prometteur, qui flirte avec le chef d'œuvre.
À l'heure où fleurissent plus que jamais adaptations, reprises, remakes, et autres sequels, « Les Bêtes du sud sauvage » apparaît comme un ovni à la fois naïf et conquérant, souverain, sidérant d'originalité et de créativité. Il célèbre la vie comme un tourbillon d'épreuves auxquelles nous sommes tous un jour ou l'autre confrontés, et fascine par sa démonstration de virtuosité. Car oui en effet, jamais les bayous de Louisiane n'auront été si bien filmés au cinéma. Tout est à déguster dans ces « Bêtes du sud sauvage » : de la mise en scène impeccablement maîtrisée (avec comme unique reproche une caméra peut être parfois trop mouvante) aux ficelles d'un scénario poétique, écrit par Zeitlin et son acolyte féminin, Lucy Alibar, et riche en thématiques matures (transmission morale d'un père à sa fille, affrontement de catastrophes naturelles, respect de la faune et la flore terrestre), rappelant par moments les fables du japonais Miyazaki.
Transcendé par une sublime B.O composée par Zeitlin lui-même (décidément sur tous les fronts sur son bébé), aidé de Dan Romer, cet hommage à la terre outragée doit énormément également à son actrice principale, Quvenzhané Wallis, absolument géniale dans le rôle (difficile) de l'enfant Hushpuppy, qui, du haut de ses 9 printemps à peine, est la vraie révélation du film.
D'autant plus quand on sait à quel point le casting de la perle aura été difficile si l'on compte les 4000 enfants auditionnés lors de la pré-production du long métrage, rien que ça ! Son parcours ne doit d'ailleurs pas s'arrêter en si bon chemin puisqu'elle a été engagée depuis par Steve McQueen (II), le réalisateur de « Shame », pour la distribution de son nouveau bijou, « Twelve Years a Slave », et doit graviter par conséquent autour de Brad Pitt et Michael Fassbender. Une prouesse pour une comédienne encore inconnue il y a quelques semaines. Le personnage qu'elle incarne ici représente à la fois l'innocence et la naïveté, mais aussi la compréhension du danger et la force de caractère, traits de personnalité inculqués par sa propre figure paternelle.
Bilan : Un bouche-à-oreille porteur aura permis au film universel de Benh Zeitlin d'atteindre à raison le cœur des critiques et d'envisager pourquoi pas quelques prestigieuses statuettes aux grandes cérémonies internationales à venir.
 
La Bande Annonce des bêtes du sud sauvage:
 
 
NOTE: 8,5/10

dimanche 16 décembre 2012

Télé Gaucho

Deux ans à peine après le rafraîchissant « Nom des gens », récompensé du César du meilleur scénario original et de celui de meilleure actrice pour Sara Forestier, Michel Leclerc est de retour avec une comédie populaire aux dimensions sociales et politiques, librement inspirée de faits réels : « Télé Gaucho ».
Synopsis (source : Allociné) Tout a commencé lorsque les caméscopes ont remplacé les caméras. Faire de la télé devenait alors à la portée de tous. Jean-Lou, Yasmina, Victor, Clara, Adonis et les autres ne voulaient pas seulement créer leur propre chaîne de télé, ils voulaient surtout faire la révolution. Ainsi naquit Télé Gaucho, aussi anarchiste et provocatrice que les grandes chaînes étaient jugées conformistes et réactionnaires. Cinq années de grands foutoirs, de manifs musclées en émetteur pirate, de soirées de beuveries en amours contrariées…et ce fut ma parenthèse enchantée.
Après une première demi-heure forte sympathique et percutante, parfois même en forme d'hommage visité d'allusions au cinéma de Godard et de Truffaut, le nouveau film de Michel Leclerc laisse malheureusement place à un spectacle qui se mord la queue, s'égarant dans ses propos et dont les personnages, pourtant étoffés, deviennent vite agaçants car outrageusement caricaturaux.
Michel Leclerc l’avait déjà prouvé avec « Le Nom des gens », il aime le cynisme et la Gauche. Oui la Gauche de Jospin. Seulement voilà, il nous avait déjà gratifié d'une précédente mouture sur ce thème et celle-là sent, du coup, le réchauffé. À tel point qu'on a parfois l'impression d'être face au « Nom des gens 2 » et non face au long métrage original attendu.
Sara Forestier reprend ainsi son rôle attachant de gauchiste nymphomane complètement givrée tandis que Maïwenn interprète une militante tellement hystérique qu'elle en devient insupportable. Totalement horripilante !
Reste les personnages masculins, brillamment incarnés par le jeune premier Félix Moati, découvert en 2009 dans « LOL », et le plus confirmé Eric Elmosnino, impeccable en activiste déjanté. Ces deux protagonistes générationnels sont d'ailleurs probablement le miroir de la personnalité du metteur en scène himself, pétris de ses propres traits de caractère et nourris de plusieurs éléments autobiographiques.
Saluons également la présence de maintes pépites de cinéma comme les séquences très Gondryiennes très réussies des « Objets qui nous font chier », elles-mêmes issues de l'émission « Télé Bocal » et ici pastichées.
En deux mots : une suite officieuse au « Nom des gens » en guise de troisième film pour Michel Leclerc, qui ne réussit malheureusement pas à transformer l'essai, bien que sa nouvelle comédie bénéficie d'une première demi-heure savoureuse et jouit de purs instants de cinéma pilotés par des acteurs bien drivés. On attend le quatrième long métrage du bonhomme pour se faire une meilleure idée.
 
La Bande Annonce de Télé Gaucho:
 
 
NOTE: 6/10