Cannes, mai 2012. « Cosmopolis »,
le nouveau Cronenberg est présenté sans grands roulements de
tambour en sélection officielle du Festival. Parallèlement, c'est
un autre Cronenberg, Brandon, rejeton du célèbre metteur en scène
canadien, qui détonne sur la croisette dans la catégorie « Un
Certain Regard » avec sa première œuvre en qualité de
réalisateur, « Antiviral », film au nom annonciateur
d'un projet très proche de l'univers de son papounet. Aujourd'hui,
« Antiviral » sort en salles, après avoir raflé entre
temps le prix du meilleur premier film canadien au Festival international du film de Toronto. David a bel et bien transmis le
virus du cinéma à sa progéniture Brandon, mais lui a-t-il inculqué
ses ficelles ?
Synopsis (source :
Allociné) La communion des fans avec leurs idoles ne
connaît plus de limites. Syd March est employé d'une clinique
spécialisée dans la vente et l'injection de virus ayant infecté
des célébrités. Mais il vend aussi des échantillons, pour son
propre compte, à de puissantes organisations criminelles. Sa méthode
pour déjouer les contrôles de la clinique : s'injecter les
virus à lui-même...Mais ce procédé va s'avérer doublement
dangereux : porteur du germe mortel ayant contaminé la star
Hannah Geist, Syd devient une cible pour les collectionneurs...
Au départ, « Antiviral »
s'amorce sur les chapeaux de roue, à l'instar d'une publicité pour
la célèbre société « Umbrella Corporation », issue de
la saga vidéo-ludique « Resident Evil ». Fort de son
atmosphère futuriste étouffante, d'une mise en scène affirmée,
d'une esthétique singulière faisant la part belle à un blanc
immaculé (bravo à l'impeccable photographie signée Karim Hussain,
déjà auteur des images poisseuses du déjanté « Hobo with a shotgun ») et d'une BO electro-dark psychédélique composée
par E.C. Woodley, le film va au-delà en intriguant grâce à son
pitch pour le moins barré.
Via un abord plutôt dystopique,
Cronenberg junior réussit là où Cronenberg senior a échoué avec
son « Cosmopolis ». Un seul et unique objectif pourtant,
commun aux deux long-métrages : dresser la satire du
capitalisme.
« Les stars ne sont pas des gens,
mais des hallucinations collectives », cette phrase prononcée
à un moment donné retentit comme la démonstration parfaite du
propos de Cronenberg fils, ce dernier, fier de l'héritage de son
Papa (remember « Videodrome » et « eXistenZ »),
émettant habilement un jugement critique vis-à-vis de ces dérives
technoïdes qui érigent le star system en nouvelle religion.
Parlons maintenant du héros, similaire
dans les deux œuvres des Cronenberg, rongé et torturé par le mal
qu'il incube, la force du pouvoir & de la richesse pour l'un
(Robert Pattinson dans « Cosmopolis »), les pathologies
en miroir d'un fantasme sexuel cannibale high-tech pour l'autre (la
révélation masculine Caleb Landry Jones, après son passage éclair
chez les mutants de Matthew Vaughn dans « X-men lecommencement »). Un calvaire interminable en somme, néanmoins
jubilatoire pour le spectateur.
Impossible de ne pas saluer la
fabuleuse interprétation tout en finesse de Caleb Landry Jones,
grand acteur en devenir. Un Marcel blanc à la « Funny Games »
s'imprégnant de sang dont l'écarlate s'excite avec la progression
de l'agonie ? Que nenni pour Landry Jones qui porte
littéralement le film sur ses seules épaules (ou presque). Le
casting bénéficie également de la luxueuse présence de
l'infatiguable Malcolm McDowell, décidément abonné aux films
« particuliers ».
Petit bémol au générique,
pardonnable néanmoins, si l'on regarde le budget dérisoire du
projet : « Antiviral » aurait certainement gagné en
profondeur, ainsi qu'en force du sujet si le visage féminin avait
été plus perméable pour les mémoires via l'emploi d'une actrice
mondialement connue. Non pas que Sarah Gadon ne fasse pas le boulot,
mais, quitte se rincer l'œil. on aurait plutôt préféré baver
devant une étoile d'Hollywood.
Bilan : Certes le long
métrage de Brandon Cronenberg n'est pas exempt de défauts, mais il
faut admettre que l'éducation père – fils Cronenbergien a bien eu
lieu. « Antiviral » est un objet cinématographique non
identifié, comme il s'en fait rare de nos jours. Brandon Cronenberg : un fiston apprenti réalisateur à suivre !
La Bande Annonce d'Antiviral:
NOTE: 8,5/10
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