lundi 9 décembre 2013

Le Cinquième pouvoir

L’histoire de Julian Assange et de son mondialement célèbre site WikiLeaks passionne encore le globe, en partie car elle n’est pas achevée. En effet, Julian Assange, après avoir diffusé plus de 400.000 documents confidentiels – notamment sur les méthodes parfois musclées de l'armée américaine en Irak – vit aujourd'hui reclus dans l’ambassade d’Equateur en plein cœur de Londres, sous le coup d'une extradition demandée par la Suède. Une trajectoire de vie mouvementée … du pain béni pour la planète Hollywood, en somme. C'est en toute logique donc que sort en salles le thriller / biopic « Le Cinquième pouvoir », réalisé par Bill Condon et inspiré en partie par le livre autobiographique écrit par Daniel Domscheit-Berg, ex-meilleur ami d'Assange et co-fondateur de WikiLeaks.
Synopsis Allociné : En rendant publics des documents confidentiels, ils ont fait vaciller les plus grands pouvoirs de la planète. La révélation d’informations ultra-secrètes explosives a mis en lumière un monde jusque-là inconnu. WikiLeaks a changé la donne à jamais. Comment Julian Assange, fondateur de WikiLeaks, et Daniel Domscheit-Berg, ont-ils pu obtenir ces documents ? Comment est né leur site qui, en quelques mois, a réussi à révéler bien plus de secrets que tous les plus grands médias officiels réunis ?
D'emblée, la comparaison du « Cinquième pouvoir » avec « The Social Network » saute aux yeux et paraît plus que tentante. Soucieux de brosser un portrait détaillé d’une personnalité complexe, auteur d’un changement majeur dans l’ère numérique, le cinéaste Bill Condon (« Dr Kinsey », mais aussi hélas les deux derniers volets de l'horrible saga « Twilight ») et le scénariste Josh Singer proposent un biopic lourd et conventionnel, dont la vision unilatérale est celle de Daniel Berg, bras droit d’Assange et injustement présenté comme « le gentil de l’histoire ». Manichéen au possible ! « The Social Network » est tout ce que « Le cinquième pouvoir » n’est pas : un drame intimiste, percutant et criant de vérité, transcendant un propos plus qu'un personnage (Mark Zuckerberg) ou un site (Facebook).
Pleinement conscient qu’il est difficile de mettre en scène des types barricadés en permanence derrière leurs computers, Condon emprunte énormément de plans à « The Social Network », et met notamment l'accent sur la relation Julian Assange (Benedict Cumberbatch) / Daniel Berg (Daniel Brühl) de la même manière que Fincher l'avait effectué avec l'union Zuckerberg / Eduardo Saverin. Une amitié qui s’envenime progressivement lorsque Berg se rend compte de l'indifférence affective de son partenaire charismatique face aux vies humaines qui pourraient être mises en danger à la suite des fuites de documents secrets américains sur la guerre en Irak. Les raccourcis, esthétiques et scénaristiques, sont omniprésents et dessèchent totalement la mise en scène, qui devient dès lors aussi artificielle et caduque que le récit, ce malgré une batterie d’effets visuels profitables, quoiqu'un poil nauséeux et épileptogènes – split-screen, textes à l’écran et volets verticaux.
 
Alors que Benedict Cumberbatch, la star de « Sherlock », s'avère convaincant dans le rôle d’Assange – un zézaiement dans la voix, les cheveux blancs, les yeux bouffis, un regard méfiant – le film ne dépasse pourtant jamais les manchettes des journaux, en d'autres termes les faits déjà connus.
Mis à part lors du dernier acte un peu plus vigoureux, « Le Cinquième pouvoir » paraît vraiment inerte, peut-être parce les questions d'ordre politiques ou morales ne sont au final que survolées. L'éthique de la fondation WikiLeaks est « bousculée », mais nulle position ferme quant à ce propos n’est tenue. Ainsi, l’importance des événements WikiLeaks qui ont bouleversé le web n’est jamais réellement marquée.
Bilan : « Le Cinquième pouvoir », biopic centré sur le nerd Julian Assange, souffre indéniablement de la comparaison avec « The Social Network », étalon d'or du genre. Le réalisateur Bill Condon peine ici à frapper la conscience collective, et ne répond jamais aux questions fondamentales soulevées par l’affaire WikiLeaks. « Le Cinquième pouvoir » laisse ainsi un goût (amer) de bâclage en sortie de projo.  

Anecdote Allociné : Le véritable Julian Assange n’a pas apprécié « Le Cinquième pouvoir » et l'a bien fait savoir. Après avoir exprimé son mécontentement au sujet du film dont il jugeait le propos erroné, l’informaticien australien a choisi de torpiller la sortie du long-métrage en proposant son propre documentaire, "Mediastan", sur l’opération Cablerun qui rendit célèbre son site WikiLeaks. En 2010, des milliers de documents confidentiels des institutions étatiques américaines ont été envoyés aux médias (dont le New York Times et The Guardian) et dévoilés au monde entier. Plus de 500 000 téléchargements du documentaire ont été dénombrés le week-end de sa sortie.

La Bande Annonce du film Le Cinquième pouvoir :


NOTE : 4/10

Article rédigé par Cléa Carré.

3 commentaires:

  1. Je suis bien d'accord sur toute la ligne, même si je trouvais, lors des scènes où les deux protagonistes principaux pianotent sur leur ordinateur, que le montage et les phrases que nous propose le dialoguiste sont typiques d'une grosse pub IBM et que les déclenchements d'action tentées par le réalisateur sont finalement vaines (Brühl qui est immobile=moyen d'instaurer un rythme nerveux chez Condon apparemment). Le reste c'est exactement ce que je pense, un film qui n'a rien de neuf et qui a un scenario tenant sur une page wikipedia écrite par Berg.

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    1. Merci pour ton comm' Tanguy. Ah ah, t'es chaud sur Berg toi, pourtant il a réalisé un très bon film : VERY BAD THINGS, voire même deux avec LE ROYAUME. Le reste est bof bof voire mauvais.

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    2. Je parlais du personnage incarné par Brühl dans le film ^^ il s'appelle Daniel Berg

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