Barry Levinson, réalisateur de plusieurs chefs d'œuvre dans les
années 80-90 « Good Morning, Vietnam », « Rain Man », « Sleepers », ou encore « Liberty Heights », s'est hélas retrouvé pupille de la nation
(hollywoodienne) à l'aube des années 2000 après l'échec en salles
de « Bandits ». Aujourd'hui, le vieux roublard effectue
un come-back totalement improbable et inattendu, avec le film
d'épouvante « The Bay », produit par les inénarrables
Jason Blum & Oren Peli et présenté en septembre dernier au
Festival international du film de Toronto.
Synopsis Allociné :
Dans la baie du Maryland, une bactérie non identifiée contamine le
lac et ceux qui s'en approchent …
Ressuscité par
Jason Blum, Barry Levinson revient en force avec ce film d'horreur à
micro-budget – du genre Found Footage – prenant pour cadre
la petite ville côtière de Chesapeake Bay, prospère grâce à sa
vie aquatique, mais rapidement victime d'une panique générale suite
à une épidémie mortelle causée par un parasite toxique.
Sacrément
intelligent le Barry Levinson.
Première brillante
idée : s'être allié aux kings du film low budget –
big profit aka Jason Blum & Oren Peli (la saga
« Paranormal Activity », « Sinister »,
« Insidious », « Dark Skies ») pour
s'assurer d'un large éventail de distribution sur le sol américain
et le territoire international.
Seconde initiative
pertinente : à l'instar du « Projet Blair Witch »
pionnier en la matière, de « [REC] » ou de
« Cloverfield », Barry Levinson a choisi le « Found
Footage » pour donner plus de crédibilité aux événements
racontés. Souvent décrié car reflet d'un cache misère, le procédé
vraiment immersif met ici subtilement en valeur la trame
scénaristique empreinte d'un réalisme
angoissant.
De même, le choix
astucieux d'avoir adopté plusieurs points de vue, dont celui d'une
journaliste, incarnée par Kristen Connolly (révélée dans un
autre film d'horreur « La Cabane dans les bois »), figure
représentative de la diffusion d'informations.
Troisième
prouesse : l'utilisation, sans surenchère, des moyens
technologiques actuels pour rendre compte du concept d'épidémie, le
développement et la propagation rapide (à vitesse grand V) d'une
maladie contagieuse. Ainsi Levinson exploite à bon escient tout le
panel des armes de communication et d'expression virale
contemporaines : émissions radiophoniques, podcasts, réseaux
sociaux (Facebook, Twitter), la plate-forme YouTube, GPS, e-mails,
blogs, Skype, Wikipédia, Smartphones, appareils photos,
produits Apple … et montrent parallèlement avec ingéniosité à
quel point tous ces éléments de pointe ne permettent hélas en
aucun cas d'enrayer l'épizootie. Et c'est sans doute
ce troisième point qui est le plus grand tour de force de « The Bay » : une gravité alarmante, faussement confondue avec
la réalité, grâce à la diversité employée : des médias
aux techniques consacrées.
« The Bay »,
tourné en 18 jours et réalisé à l'aide de 21 supports numériques
différents, dont notamment une caméra de télévision, un iphone,
une caméra de surveillance, l'objectif d'un matériel endoscopique
d'hôpital, le rapport filmé de deux océanographes, une
vidéo-surveillance d'une patrouille de police, des images de
visioconférences, l'appareil photo d'une famille et une webcam, est
un long métrage perspicace, qui reproduit à merveille, comprenez là
avec un hyper-réalisme effrayant, le langage visuel propre aux
vidéos amateurs pour dénoncer malicieusement in fine
l'irresponsabilité du gouvernement et son silence radio face aux
risques écologiques, ainsi que le retard des autorités sanitaires
dans la prise en charge de la contamination.
Barry Levinson
maîtrise son film de bout en bout, dépasse l'échelle locale pour
matérialiser une ambiance post-9/11 cristallisée par la paranoïa
des habitants de cette ville de l'Amérique profonde.
Cousin éloigné de
« The Faculty » et « Cabin Fever »,
assaisonné à la sauce Found Footage, « The Bay »
ne délaisse pas pour autant la terreur pure et dure, avec quelques
frissons garantis lors de certaines séquences : la ville
jonchée de cadavres, l'isopode qui dévore littéralement les corps
humains, les furoncles qui apparaissent sur la peau des
protagonistes, le suicide comme unique alternative … Dans « The Bay », la peur est partout : sur l'eau (bateau), dans
l'eau (plongeurs, baigneurs, pêcheurs), à terre (sur les pontons de
port, et dans la ville elle-même) et personne n'est épargnée.
Saluons enfin la
progression intéressante du long métrage avec des révélations
distillées au fur et à mesure grâce à l'intervention des membres
du CDC et de quelques personnages emblématiques (un médecin
recroquevillé à l'hôpital, deux pêcheurs hydrographes, la fameuse
journaliste), ainsi que le climat oppressant garni d'obsessions
parasitaires que ne dénigreraient pas David Cronenberg ou Guillermo del Toro. Le montage d'Aaron Yanes aide outre mesure à s'imprégner
bien évidemment de toute cette frayeur.
Bilan :
Un retour salles obscures inespéré mais foudroyant pour Barry Levinson qui signe avec « The Bay » l'un des meilleurs
films d'horreur de l'année et sans doute le plus habile, grâce à
la création d'un genre nouveau, le « Found Footage collectif
», style très récurrent dans le documentaire, mais loin d'être si
fréquent que ça dans l'univers de la fiction.
La Bande Annonce de The Bay:
NOTE: 7/10
moi aussi j'ai été bluffé même si j'étais un peu moins enthousiaste !
RépondreSupprimerça fait plaisir :)
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